Prendre parole public

Comment parler de son livre en public ?

Bien que la plupart des gens ont du mal à le croire, je suis une grande timide. Prendre la parole en public est pour moi une épreuve qui me demande beaucoup de préparation et de nombreux exercices de respiration. C'est pourquoi j'ai toujours préféré le verbe à la parole. Malheureusement, je l'ai appris un peu tard, être écrivain impose de prendre la parole en public pour venir défendre son travail. Et je n'étais pas préparée à cela... Voici quelques conseils pour vous aider à parler de votre livre lors de conférences ou de salons ! A vous de jouer !

Avant de rentrer dans le vif du sujet, permettez-moi de vous partager ma "première fois". C'était en 2016, je venais de sortir mon tout premier livre (une compilation des petites anecdotes de ma vie quotidienne que je racontais alors sur mon blog) et j'avais remporté un prix. Les lauréats étaient invités à une conférence dans une grande bibliothèque parisienne. J'ai bien sûr accepté cette invitation mais n'ai pas dormi pendant des nuits entières tellement j'étais stressée : j'allais devoir prendre la parole devant une salle comble, répondre à des questions... et être comparée avec les trois autres auteurs présents (bien plus expérimentés que moi, d'après ce que je voyais sur internet de leurs parcours littéraires). Bref, j'avais la trouille. Mon mari, ancien avocat, m'a entraînée : il m'a appris à parler, à me tenir, à règler le débit et le volume de ma voix. Le jour J, j'étais prête (du moins, en apparence). Arrivée dans la salle, les organisateurs nous annoncent, ravis, qu'il y a une vingtaine d'inscrits (la moitié étant mes amis et ma famille, je me sens très soulagée. Moi qui m'imaginais déjà parler devant plus de 100 personnes : quelle naïve j'étais...). A ma grande surprise, l'une des autrices blêmit : "oh mon Dieu, mais il y a beaucoup de monde". J'ai alors compris que je n'étais pas la seule à avoir peur...

Nous avons pris place autour une grande table, face au public, et la journaliste chargée de mener les entretiens a posé sa première question. Fort heureusement, je n'étais pas la première à répondre, car je n'ai pas compris le sens de la question : "quelles sont vos références tutélaires ?". Voyant que l'autrice déjà stressée par la "foule" présente était devenue rouge pivoine et tentait laborieusement de répondre, bizarrement, je me suis détendue. Je me suis dit que, foutue pour foutue, j'allais essayer de répondre à ma manière, telle que je suis dans la vie. Je ne suis pas une grande littéraire, je ne connais pas tous les grands auteurs mais je suis sûre d'une chose : je sais raconter les histoires et je suis marrante (du moins j'essaie). Alors je me suis lancée. Et j'ai découvert que je n'étais pas si nulle.

Mais à chaque fois que je dois reprendre la parole, je repense à ce jour-là... Et aux précieux conseils donnés par mon chéri, qui me servent encore beaucoup !

 

Conseil n°1 : préparer son "elevator speech"

Quand tu prépares des entretiens d'embauche, on te demande d'être capable de présenter ton parcours en moins d'une minute (l'équivalent d'un trajet en ascenseur, d'où ce nom) : et bien j'ai vite remarqué qu'il en va de même quand tu as publié un livre. Que ce soit au cours d'un salon, d'une conférence ou avec un journaliste, on te demandera forcément de présenter ton livre. Alors pour être sûr d'avoir la bonne approche (ni trop long, ni trop court, et surtout qui pose l'histoire sans trop en révéler tout en donnant envie d'acheter le livre), je vous conseille de préparer votre texte et de l'apprendre par coeur. Dites-le à voix haute, testez-le auprès de vos proches qui ont lu le livre (ou pas...) : l'essentiel c'est de maîtriser parfaitement ces quelques phrases pour vous y raccrocher si vous êtes rattrapés par le stress le jour J !

 

Conseil n°2 : travaillez votre diction

Quand je suis stressée, j'ai tendance à parler plus vite et moins fort, ce qui est désagréable (donc gênant) pour l'auditoire. Pour éviter ce phénomène, j'essaie de bien respirer avant de parler et je pose ma voix. Cela passe d'abord par une bonne position du corps (qui doit être ancré dans le sol si vous êtes debout ou bien installé dans votre siège si vous êtes assis) : si vous vous tenez mal, vous respirerez mal et parlerez mal... Pensez également à relever le menton : votre voix partira vers votre auditoire et sera plus audible. Enfin, n'oubliez pas une chose : le silence apporte également beaucoup à un discours. Lorsque vous prenez la parole en public, une seconde de blanc vous semble durer ue éternité, alors qu'elle permet au contraire une petite respiration pour tout le monde !

 

Conseil n°3 : souriez et regardez les gens

Il n'y a rien de pire qu'une personne sur scène qui répond à une question en fixant ses chaussures ou s'adresse seulement à l'intervenant qui a posé la question. Dans les conférences littéraires, le public a envie qu'on s'adresse à lui. Pour ma part, j'essaie d'abord d'être très souriante. Bien sûr, si vous parlez d'un livre très triste sur l'holocauste (sujet peu propice à la galéjade), évitez d'en faire trop : le sourire n'a pas besoin d'être blagueur, il peut inciter à la douceur, la réflexion, la sérénité. Le regard aussi est très important : lorsque je dois parler en public, je m'efforce de regarder plusieurs personnes (pas toujours la même !) dans les yeux : une sorte de petit lien se crée et cela me donne du courage.

 

Conseil n° 4 : écoutez les questions

Il n'y a rien de pire qu'une personne qui répond à côté de la plaque parce qu'elle n'a pas écouté la question. Mais forcémenet, avec le stress, difficile de rester concentré... Il est donc nécessaire de faire un effort les premières fois pour bien écouter toute la question sans être déjà en train de préparer sa réponse dans sa tête. Idem si vous êtes plusieurs à intervenir sur scène : pouvoir rappeler ce qu'a dit quelqu'un juste avant vous ou réagir à une autre intervention montre également que vous vous intéressez à autre chose qu'à vous-même...

 

Conseil n°5 : tenez correctement votre micro

Oui, je sais, cela peut sembler évident. Mais l'expérience montre que ce n'est pas si simple... Si vous tenez mal votre micro, on ne vous entendra pas. Alors prenez le bien en main en le serrant fermement dans votre poing (comme quand vous mangez une banane) et approchez le au niveau de votre menton à un centimètre de votre bouche. Essayez de ne pas bouger le bras qui tient le micro : si vous parlez beaucoup avec les mains, utilisez plutôt votre main libre pour faire de grands gestes, votre micro devant rester à sa place dès que vous parlez. Quand vous n'avez pas la parole, éloignez le micro de votre bouche (histoire que tout le monde n'ait pas à entendre votre respiration en fond sonore) et ne le faites pas bouger pour ne pas créer de bruits parasites. Le micro est votre ami : arrêtez d'en avoir peur ! Et si vous n'avez pas l'habitude de parler dans un micro, achetez vous un micro spéciale karaoke (ça coûte 20 balles) et entraînez vous à la maison !

 

Conseil n°6 : buvez de l'eau

Vous avez déjà écouté parler quelqu'un qui fait d'horribles bruits de bouche ? Pas la peine d'essayer de vous rappeler ce pénible souvenir : c'est insupportable ! Alors pour éviter ce genre de désagrément (qui empêche votre auditoire de vous écouter tranquillement), pensez à apporter une petite bouteille d'eau que vous garderez à proximité. Et peu avant que ce soit votre tour de prendre la parole, buvez une petite gorgée, histoire d'humidifier votre bouche et de règler le problème de la "bouche sèche" accru par le stress. Et si vous n'avez pas d'eau (attention, truc magique utilisé par Céline Dion), mordez vous le bout de la langue avec les dents de devant : ça active la production de salive et peut limiter les dégâts. Ne me remerciez pas :)

 

Conseil n°7 : le petit plus, faites du story telling

Dans la com', le story telling, c'est l'art de raconter des histoires pour vendre un concept, un produit... Lorsque vous parlez de votre livre, bien entendu vous en racontez l'histoire, mais pas que. Ce que vous vendez, c'est vous. Et si vous êtes plusieurs auteurs, il faudra vous différencier par rapport aux autres. Alors quoi de mieux que de raconter une petite anecdote percutante, une histoire marrante que les gens retiendront ? Laissez-moi vous donner un exemple : il y a quelques mois, je participais à un salon au cours duquel tous les auteurs étaient invités à passer en table ronde. Nous étions donc très nombreux. Triste hasard du calendrier, je suis passée lors de la dernière table ronde, et en dernière position. Pas facile, après une journée entière, de parler à la fin et de se différencier alors que tout a sûrement été dit. Quand la personne qui animait le débat m'a demandé mon parcours d'écriture, je suis un peu sortie des sentiers battus : au lieu de raconter que j'écrivais depuis toujours (ce qui est le cas, comme pour beaucup d'écrivains), j'ai évoqué mon parcours de conceptrice-rédactrice freelance, qui m'avait amenée à écrire sur tout et n'importe quoi, et notamment 40 articles sur les charriots élévateurs. Grosse rigolade de la salle. Ambiance détendue. Plein de ventes sur la fin de salon. Et surtout, lors du cocktail, plusieurs personnes sont venues me parler de cette anecdote. En soi, elle n'avait rien d'incroyable, mais elle a permis de faire en sorte qu'ils se souviennent de moi et aient un sujet de conversation facile pour venir me voir par la suite...

 

Pour finir

Etre auteur, ce n'est malheureusement plus seulement rester chez soi à faire ce qu'on aime : écrire. Il faut également se mettre en avant, se vendre, faire la différence... Et cela passe par l'oral. N'ayez pas peur : acceptez toutes les occasions (même les plus pourries - au début au moins) pour vous faire la main. Interviews, podcast, vidéos sur des chaînes régionales que personne ne regarde : allez-y et testez des choses. Comme ça, le jour où vous serez invité à "La Grande Librairie" au moins vous serez entraîné.

Et si vous voulez quelques trucs en plus, n'hésitez pas à suivre le MOOC (gratuit) de Open Classrooms sur la prise de parole en public, qui est très bien fait !