Ne d aucune femme

Né d'aucune femme (Franck Bouysse)

Il y a des livres qui ne vous laissent pas indifférent. « Né d’aucune femme » est l’un d’entre eux… Publié en janvier dernier aux éditions de la Manufacture, ce roman a déjà reçu de nombreux prix, parmi lesquels le Grand Prix des lectrices de Elle, le Prix des Libraires ou encore le premier Prix Babelio. Un livre qui fait parler, une couverture intrigante, une histoire pleine de mystère : il n’en fallait pas plus pour que j’ai envie de découvrir ce livre et me faire ma propre idée…

Le résumé de l’éditeur :

" Mon père, on va bientôt vous demander de bénir le corps d'une femme à l'asile ".
- Et alors, qu'y-a-t-il d'extraordinaire à cela ? demandais-je.
- Sous sa robe, c'est là que je les ai cachés.
- De quoi parlez-vous ?
- Les cahiers... Ceux de Rose.
Ainsi sortent de l'ombre les cahiers de Rose, ceux dans lesquelles elle a raconté son histoire, cherchant à briser le secret dont on voulait couvrir son destin. Franck Bouysse, lauréat de plus de dix prix littéraires, nous offre avec Né d'aucune femme la plus vibrante de ses œuvres. Ce roman sensible et poignant confirme son immense talent à conter les failles et les grandeurs de l'âme humaine.

Qu’est-ce que j’en ai pensé ?

Disons-le franchement, ce livre m’a déstabilisée. Pour être tout à fait honnête, je n’ai pas aimé les premières pages, qui présentent Gabriel, jeune curé de campagne. Ce n’est pas le fond qui m’a troublée, mais la forme. Je ne suis pas habituée à ce genre d’écriture, un peu emphatique, illuminée, très religieuse. Tout au long du récit, il faut également s’habituer à la manière dont sont traités les dialogues, les phrases les unes à la suite des autres : un choix littéraire qui se justifie mais demande une certaine gymnastique de l’esprit. Je reconnais que j’ai failli abandonner, mais je me suis accrochée : je me suis dit que ce livre méritait une seconde chance, et je ne regrette pas de la lui avoir donnée. Une fois passée ces quelques pages désagréables, on arrive dans le vif du sujet : lors d’une confession, Gabriel  promet à une femme dont il ne sait rien qu’il récupèrera des carnets sur le corps d’une morte qu’il sera appelé à bénir à l’asile. C’est ainsi qu’il découvre l’histoire de Rose, une jeune fille de 14 ans…

Je vous le dis tout de suite : cette pauvre Rose n’a pas une vie marrante. Aînée de quatre filles, elle est née dans une famille d’agriculteurs très pauvres. Pour survivre, son père la vend à un maître de forge qui vit dans un immense domaine avec sa mère, une femme horrible et très cruelle. Mais ce n’est que le début… Je ne peux évidemment pas vous raconter les horreurs que va subir cette petite Rose, mais croyez-moi quand je vous dis que vous n’avez pas envie d’être à sa place. L’écriture de Franck Bouysse est puissante, violente, elle présente l’être humain sous ses pires aspects et il est impossible de ne pas être ébranlé par ce récit. Certaines scènes sont d’une telle brutalité que j’ai même dû m’y reprendre à plusieurs fois pour les lire, tellement leur récit était choquant.

L’auteur a véritablement un talent pour raconter des histoires, pour faire vivre au lecteur un éventail de sentiments allant de la tristesse à la pitié en passant par la colère, le dégoût, l’incompréhension, même la douleur. Je me suis plongée dans ce livre et j’avais toutes les peines du monde à le lâcher. Jusqu’au dénouement…

Le pétard mouillé. L’effet pschittt. La douche froide. Le truc qui ne m’arrive jamais : je n’ai pas compris la fin. Je vous jure : j’en suis encore traumatisée…

ATTENTION, ENORME SPOILER ALERTE

Si vous n’avez pas lu ce livre, surtout ne lisez pas le paragraphe en gris qui suit !

Vous êtes toujours là ? Je vous aurais prévenus…

Bref, quand on découvre que le fils de Rose est également celui d’Edmond, c’est très émouvant. Sauf que… bah sauf que je ne vois pas à quel moment ils auraient couché ensemble ! J’ai forcément dû rater un truc dans ma lecture mais impossible de trouver où… Et ça n’est pas cohérent avec tout le reste de l’histoire ! Alors voilà mon dilemme : j’ai terminé ce livre depuis plusieurs jours et je n’arrête pas d’y penser. Une seule solution, le relire pour tenter de comprendre ce qui m’a échappé (sans doute une métaphore très poétique à côté de laquelle je serais passée). Mais ce roman est tellement puissant que je ne m’en sens tout simplement pas la force : une fois ça va, deux fois, bonjour les dégâts… Donc si vous l’avez lu, n’hésitez pas à m’envoyer un petit message via le formulaire de contact pour m’expliquer la fin !

 

 [EDIT DE MAI 2023 : explication du roman !!!!!]

Depuis la publication de cet article, j'ai reçu de nombreux emails de lecteurs et lectrices qui, comme moi, n'avaient pas compris. Je viens récemment de recevoir un message d'une lectrice qui aurait compris : je vous mets ici son explication :

"Rose et Edmond ont eu un rapport sexuel dans l'écurie, le soir de sa montée sur Artémis
Elle explique avoir été ds l'euphorie et reste assez flou sur le " ensuite", dans ses rêves cette idée revient puis Edmond le révèle également, lorsqu'il apprend être le père ( il parle alors de " ce qui s'était passé" )
Mais ce n'est jamais dit clairement oui !
"

 

FIN DU SPOILER

Alors, verdict ?

Malgré ce petit souci technique sur la fin, j’ai évidemment ADORE ce livre et l’écriture de Franck Bouysse, que je ne connaissais pas du tout. En revanche, je ne suis pas sûre d’avoir le courage de me lancer dans un autre de ces livres tout de suite : s’ils sont tous aussi puissants et dérangeants, je vais attendre un peu d’avoir digéré celui-ci !