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Libérées ! Le combat féministe se gagne devant le panier de linge sale (Titiou Lecoq)

La charge mentale, c’est un peu mon combat quotidien. Souvent, on me dit « tu as de la chance, ton mec t’aide vachement à la maison ! ». Ce genre de petite phrase, qui se veut gentille, a le don de m’exaspérer : non, je n’ai pas de « chance ». Tout simplement parce qu’il ne fait que sa part. Et encore, il reste quelques petits ajustements. Bref, vous l’aurez compris, le sujet est très sensible. J’ai donc commencé le livre de Titiou Lecoq en sachant par avance que ce que j’allais lire allait m’énerver…

Le pitch de l’éditeur :

« Un jour, je me suis demandée : pourquoi est-ce moi qui ramasse les affaires qui traînent ? » Je n’ai trouvé qu’une seule réponse. Parce que je suis une femme qui vit avec un homme et deux enfants et que, conséquemment, les corvées, c’est pour ma gueule.
Être une femme, ce n’est pas seulement l’idéal de minceur et de cheveux qui brillent, c’est le souci permanent des autres et du foyer, c’est être sans cesse ramenée à la saleté, aux taches, à la morve. L’égalité serait déjà là, mais les femmes conservent la conviction intérieure qu’elles doivent s’occuper de tout et tout le monde, et d’elles en dernier, s’il reste cinq minutes à la fin de leur triple journée.
Cette féminisation de la sphère privée implique une autre conséquence : l’espace public est toujours masculin. Peut-on se dire égaux quand la moitié de la population adapte ses vêtements en fonction des transports et fait attention à ne pas être seule la nuit dans la rue ? Et si le combat féministe devait encore et toujours se jouer dans la vie quotidienne de chacune et chacun, chez soi, dans sa propre maison, devant le panier de linge sale ?

Alors, verdict ?

La plupart des hommes qui liront ce livre (et encore, je ne pense pas qu’ils soient nombreux : pour l’instant je n’ai rencontré que des femmes l’ayant lu…) vous diront que c’est du n’importe quoi, encore un ramassis de conneries féministes. Et bien pour moi, ça a été tout le contraire. Une révélation, un choc, une prise de conscience. Bien entendu, je suis très informée sur le sujet : je discute beaucoup avec mes amies et collègues (je pense que la cafétéria de mon bureau est devenu un vrai lieu de débat sur la charge mentale !), je suis de nombreux comptes Instagram autour de ce sujet (Taspenséà étant de loin le plus parlant) et je me documente dès que j’en ai l’occasion. C’est pourquoi j’ai beaucoup aimé ce livre : l’autrice ne se contente pas de dénoncer une situation mais elle en fait une véritable analyse sociologique. Au-delà du vrai sens de l’humour dont fait preuve Titiou Lecoq, cet ouvrage est extrêmement bien documenté. Il raconte notamment comment a été mis en place, au 19ème siècle, un système au cœur duquel les femmes devaient rendre leur foyer agréable afin d’inciter leurs maris à rester à la maison plutôt que d’aller manifester pour les droits sociaux (je résume, bien entendu : c’est un peu plus complexe que ça, mais pas beaucoup).

Ce livre expose aussi comment la femme est devenue sa propre cheffe, qui se donne elle-même des ordres à exécuter. Car tout n’est malheureusement pas la faute des hommes : nous y sommes aussi pour beaucoup (même si nous avons inconsciemment été conditionnées à agir ainsi pendant des générations).

J’ai également trouvé hyper intéressante la partie sur l’appropriation de l’espace public par les hommes : voilà encore une question que je n’avais jamais envisagée sous cet angle…

Vous l’aurez compris, ce livre a été un véritable révélateur. Depuis, j’ai complètement changé ma façon de penser. C’est difficile à vivre, je le reconnais, mais absolument nécessaire. Cet ouvrage ne donne pas de solution miracle (si seulement) mais il met en lumière ce qui ne va pas, et c’est déjà beaucoup. A lire absolument, surtout si vous êtes une femme, surtout si vous êtes un homme, surtout si vous êtes en couple, surtout si vous êtes célibataire, surtout si vous avez des enfants, surtout si vous n’en avez pas. Bref, lisez-le !

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