Heimaey

Heimaey (Ian Manook)

Pendant le confinement, j'ai fait un beau voyage. Une somptueuse évasion sur la terre islandaise, remplie de paysages à vous couper le souffle et d'un suspense haletant qui vous donne envie de lire à toute vitesse pour connaître la suite de l'histoire et en même temps de savourer chaque mot pour faire durer le plaisir. Bref, pendant le confinement, j'ai lu "Heimaey" de Ian Manook.

A la base, disons que la littérature islandaise n'est pas forcément celle qui m'attirait le plus. Jusqu'à ce que je découvre "Snjor" de Ragnar Jonasson. Un véritable coup de coeur, que je n'ai pu m'empêcher de partager il y a quelques mois avec mon voisin de bureau. Heureuse coïncidence, il se trouve être un amoureux de l'Islande et de la littérature islandaise. Aussi, quelle n'a pas été ma surprise de trouver sur mon bureau, quelques jours avant Noël, un petit paquet bien emballé qui contenait un livre : "Heimaey". Il m'a fallu du temps avant de me plonger dans ce roman : entre l'écriture de mon prochain livre et mon boulot, je n'arrivais pas à commencer ce petit pavé (570 pages en Livre de Poche, tout de même)... Et finalement, c'est pendant le confinement que j'ai eu l'occasion de le commencer. Et je ne regrette pas. Mieux qu'un simple polar (style que j'affectionne particulièrement), mon collègue m'a embarquée dans un voyage initiatique : il avait pris soin de cacher de petits Post-it à l'intérieur du livre, pour attirer mon attention sur un lieu, une vue, une montagne... Alors j'ai cherché des images sur Internet, j'ai écouté le Krummavisur à fond dans mon casque pour en ressentir la force, j'ai lu plein de choses sur les légendes islandaises (je ne me remettrai sans doute jamais de cette histoire de Nabrok, pantalon fait de la peau d'un homme dépecé comme un lapin des orteils à la taille, bijoux de famille compris). Et grâce à ce livre, je crois que j'ai envie de connaître un peu mieux ce pays... Mais alors, de quoi parle ce bouquin ?

Le pitch de l'éditeur :

Quand Jacques Soulniz embarque sa fille Rebecca à la découverte de l'Islande, c'est pour renouer avec elle, pas avec son passé de routard. Mais dès leur arrivée à l'aéroport de Keflavik, la trop belle mécanique des retrouvailles s'enraye. Mots anonymes sur le pare-brise de leur voiture, étrange présence d'un homme dans leur sillage, et ce vieux coupé SAAB qui les file à travers déserts de cendre et champs de lave... jusqu'à la disparition de Rebecca. Il devient dès lors impossible pour Soulniz de ne pas plonger dans ses souvenirs, lorsque, en juin 1973, il débarquait avec une bande de copains sur l'île d'Heimaey, terre de feu au milieu de l'océan.
Un trip initiatique trop vite enterré, des passions oubliées qui déchaînent des rancoeurs inattendues, et un flic passionné de folklore islandais aux prises avec la mafia lituanienne : après l'inoubliable Mongolie de sa trilogie Yeruldelgger et le Brésil moite et étouffant de Mato Grosso, Ian Manook, écrivain nomade, nous fait découvrir une Islande lumineuse, à rebours des clichés, qui rend plus noire encore la tension qu'en maître du suspense il y distille.

Mon avis sur la question :

Je vais essayer de ne pas tout vous dévoiler, sinon, le livre n'a plus d'intérêt. On y suit plusieurs histoires entremêlées, qui se lient peu à peu les unes aux autres. Jacques Soulniz, ce français qui tente de renouer le contact avec sa fille mineure et fugueuse, Becky, lors d'un voyage en Islande, sur les traces d'un séjour qu'il a vécu lorsqu'il était plus jeune et qui a marqué sa vie. Kornelius, le flic islandais, véritable force de la nature. Galdur, un jeune marin mêlé à une sombre histoire de drogue. Et tous les autres, qu'ils trouveront sur leur route. Personne n'est ni tout noir ni tout blanc. A l'instar de l'Islande, qui peut être une terre à la fois hostile, chaleureuse et fascinante. On va de rebondissement en rebondissement, en menant l'enquête avec les protagonistes de l'histoire. Dès qu'on croit avoir compris, l'auteur nous emmène ailleurs, jusqu'au final. Certaines scènes sont tellement fortes, notamment celles avec les choucas (qui ne sont pas sans rappeler Les Oiseaux d'Hitchcok) que lorsque j'ai aperçu un corbeau par la fenêtre hier, j'ai sursauté et un frisson m'a parcouru le dos.

Alors oui, j'ai adoré ce livre, tellement différent de ce que j'ai l'habitude de lire. Il m'a fallu un peu de temps pour m'attacher à cette terre si spéciale, à ce mode de vie si éloigné du mien, mais il a soulevé chez moi une vraie curiosité. Je vais m'atteler à une lecture un peu plus légère, pour avoir le temps de digérer un peu toute cette sensation de lave, de cendres, de froid et de soufre qui me reste en tête, mais je sais déjà qu'un jour, je ferai un beau voyage en Islande et que moi aussi, je suivrai l'itinéraire de Jacques Soulniz pour voir en vrai ce qui m'a transportée sur le papier...